Monday, July 11, 2011

Cambodge et fascisme tropical

Jeudi 7 Juillet 2011,
Par Sam Rainsy
Libération

Le Premier ministre français était en visite officielle au Cambodge ce week-end. Il a d’abord parlé économie et mondialisation avec Hun Sen, son homologue cambodgien au pouvoir depuis plus d’un quart de siècle. Puis, aux côtés du roi Norodom Sihamoni, il a assisté à la cérémonie de la réouverture du Baphuon, majestueux temple d’Angkor reconstruit sous la direction de l’Ecole française d’extrême-orient.

Mais «Non !» monsieur le Premier ministre, l’avenir du Cambodge ne se résume pas à la restauration du site d’Angkor et à la gestion des frustrations des entrepreneurs occidentaux. Le discours de la France n’est pas à la hauteur des graves carences de la démocratie cambodgienne, et notamment de la violation continue des libertés publiques. Pourtant, c’est elle qui est à l’origine des accords de Paris de 1991, lesquels ont permis le retour de la paix et le début de la reconstruction. Mais, depuis, le régime de Phnom Penh n’a cessé de s’écarter de la «démocratie libérale et pluraliste» garantie par ces accords de réconciliation nationale. Je me souviens des propos prémonitoires de notre ancien roi. Un jour de 1994, j’étais face à Norodom Sihanouk au Palais royal de Phnom Penh. Il était alors roi du Cambodge, j’étais ministre des Finances. Il me fit cette confidence : «J’ai bien peur de connaître un jour le même sort que le dernier roi d’Italie.» Et il me rappela qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les Italiens avaient rejeté la monarchie parce qu’ils reprochaient à Victor-Emmanuel III sa trop grande faiblesse envers Mussolini. Au-delà de son souci pour l’avenir de la monarchie, Norodom Sihanouk comparait implicitement Hun Sen, l’homme fort du Cambodge, à Mussolini et il pressentait déjà le danger d’un glissement du régime vers le fascisme.


Car c’est effectivement un Cambodge en pleine dérive totalitaire que le Premier ministre français a dû découvrir lors de son voyage. Certes, on lui a certainement répété que le communisme des Khmers rouges appartenait au passé. Avec la restauration de la monarchie, le rétablissement de la religion et le retour triomphant du capitalisme, le pays vivrait une belle transition. Mais à quel prix ? Derrière une façade démocratique trompeuse, le Premier ministre français a pu entrevoir une Assemblée nationale factice où les députés contestataires sont condamnés à la prison ou à l’exil, une justice spectacle aux ordres de l’exécutif, ou encore des élections trafiquées ayant permis à Hun Sen de rivaliser en durée au pouvoir avec Kadhafi en Libye, Ali Abdullah Saleh au Yémen ou Robert Mugabe au Zimbabwe.

Mais le régime présente maintes autres caractéristiques teintées du fascisme que craignait Norodom Sihanouk. Un véritable culte de la personnalité auréole l’ancien Khmer rouge Hun Sen, qui concentre tous les pouvoirs entre ses mains. L’Etat policier de l’époque communiste demeure le pilier du régime, avec son lot d’assassinats, d’emprisonnements, et autres violations des droits de l’homme. Le roi faible reste silencieux face aux abus de pouvoir toujours plus graves. La religion omniprésente est l’opium du peuple et le haut clergé est invariablement soutenu par l’Etat pour justifier un ordre infiniment injuste. Le système économique est fondé sur un capitalisme sauvage, où les grosses fortunes sont associées au pouvoir politique, tandis que les syndicats ouvriers sont durement réprimés et leurs chefs pourchassés ou assassinés, tels Chea Vichea, Ros Sovannareth ou Hy Vuthy. C’est ce fascisme aux couleurs tropicales qui maintient le pays dans une misère profonde et qui risque de le mener au chaos, car la révolte paysanne gronde face aux confiscations incessantes de terres. Le Cambodge doit retenir la leçon des événements récents en Tunisie, en Egypte et en Libye. Le gouvernement a le devoir de chercher à comprendre les souffrances et la colère du peuple afin d’éviter une révolution violente. C’est à la France et aux amis du Cambodge de convaincre Hun Sen de préparer l’alternance. Et de rappeler sans cesse les accords de Paris pour soutenir l’œuvre de reconstruction de mon pays.

Espérons que le 23 octobre, jour du vingtième anniversaire de la signature de ces inestimables accords de 1991, tous les Cambodgiens auront la joie d’assister au rétablissement du processus démocratique, condition sine qua non pour tout autre progrès.

2 comments:

Anonymous said...

Cambodia is different from Tunisia, Egypt and Libya.
The latter countries are free from their neighbor political interference.
If there is a political uprising in Cambodia, the numerous Vietnamese agents will sabotage and turn it into a bloodbath.
In order for the revolution in Cambodia to succeed, the freedom loving Vietnamese people have to start the political uprising in Vietnam first.

Anonymous said...

I totally agreed with you,8:42AM.
Vietnam invested and controlled
Cambodia:
*travel agency,rubber fields,etc...
*6,000,000 Vietnamese immigrants;
*20,000 Vietnam troops,security
officials,etc...
*businesses and on...
ខ្ញុំយល់ស្របតាមមតិលោក 8:42AM;
យួនបានធ្វើវិនិយោគ និង​ ត្រួតត្រាខ្មែរ:
*ភ្នាក់ងារទេសចរ ចំការកៅស៊ូ ។ល។
*ជនអន្តោប្រវេសន៍យួន ៦,000,000នាក់
*កងទ័ពយួនមានចំនួន ២០,000កងពលធំ
*ក្រុមយកការសម្ងាត់មួយចំនួន ថែមទៀត ។ល។
*ក្រុមពាណិជ្ជកម្មមួយអន្លើ។
ដូច្នេះការរើបម្រះពីយួន លុះត្រាតែយួនចាប់ផ្ដើម
មុនខ្មែរនាអនាគតខាងមុខនេះ។