Un monde sans pitié
L'éditorial de Richard Cannavo
Le Nouvel Obs
"Au Cambodge, il est bein connu que la virginité est un commerce." - Un officier de police
Vendues encore enfants, comme de simples marchandises, maltraitées; violées, nombre de petites Cambodgiennes finissent dans des bordels avant de mourir du sida.
J'ai vendu ma virginité 500 dollars à un vieil homme, pour aider ma famille : c'était la seule chose de valeur que nous possédions. » Au Cambodge, les femmes n'ont pas vraiment voix au chapitre, et les adolescentes moins encore. Innocentes, ignorantes, les plus pauvres d'entre elles sont arrachées à leur paisible campagne par un parent, un ami, un voisin sous de fausses promesses d'une vie meilleure, certaines sont droguées et kidnappées avant d'être vendues. «La personne qui m'a trahie était un ami. Je devais travailler dans un restaurant pour 145 dollars par mois. Et j'ai été violée...» Elle est encore comme hébétée : «J'ai appelé au secours mais personne n'est venu. J'avais été vendue. Le client pouvait faire ce qu'il voulait de moi. » Parfois le malheur provient de leur propre mère : « J'étais endettée et je cherchais à survivre. J'ai dû vendre ma fille pour 300 dollars. Maintenant j'ai de la peine pour elle... » Les très jeunes filles sont une marchandise comme une autre, dans ce pays où la virginité est un bien recherché parce que doté de vertus magiques. « Les hommes pensent que s'ils ont des rapports sexuels avec une vierge leur peau blanchira, qu'ils rajeuniront et prolongeront leur vie. » «La police et la population en général n'ont aucune notion de ce qu'est la pédophilie. Il n'existe même pas de mot, en khmer, pour désigner ce phénomène !», déplore le responsable d'une ONG. «Au Cambodge, il n'y a pas d'égalité entre les sexes, explique une vieille femme. On dit que si un homme se conduit mal, il peut s'en laver et il redevient propre. En revanche, les femmes sont comme du tissu blanc : si elles font quelque chose de mal, le tissu sera sale pour le restant de leur vie... » Ainsi, une jeune fille ayant perdu sa virginité attire le déshonneur sur toute sa famille, et devient une paria.
Ce sont de ravissantes gamines fracassées de l'intérieur qui ont du mal à retenir leurs larmes. A 13 ans, Trem porte en elle une tristesse qui ne s'effacera jamais : « Je travaille depuis un an. Le tarif dépend du nombre de rapports. Parfois ils ont pitié de moi parce que je suis si jeune. » Les hommes qui ont accepté de témoigner dans ce film remarquable de Matthew Watson affichent un incroyable cynisme : «J'ai payé 400 dollars pour sa virginité, et pour sept jours de sexe. Quand on a fait l'amour pour la première fois elle avait l'air normale, elle se plaignait juste d'une douleur au ventre. » «Je ne sais pas combien il a payé. Je sais juste que je suis restée enfermée avec cet homme pendant une semaine, sans avoir le droit à rien. Je devais rester dans cette chambre et coucher avec lui. Et même si je ne parvenais pas à m'arrêterde pleurer, il voulait quand même ma virginité. » Des jeunes gens expliquent paisiblement, face caméra, que lorsqu'ils sont nombreux, si l'une de ces malheureuses ne met pas de bonne volonté à les satisfaire tous, ils se voient alors contraints d'utiliser la violence... La menace du sida a encore accentué la quête de virginité, et rendu ce business si lucratif qu'il a vu se multiplier les intermédiaires : des rabatteurs écument les campagnes à la recherche de très jeunes filles. Une responsable d'ONG explique : « Un client peut se payer une vierge pour une semaine ou un mois, puis il la revend dans un bordel Nous avons beaucoup de cas de filles qui ont été achetées à 12 ou 13 ans et qui se retrouvent prostituées. Leur vie est finie. La plupart d'entre elles attrapent le sida, et n'ont plus d'avenir. » Les témoignages de ces gamines aux yeux vides se succèdent. Elles disent, d'un ton las, résignées : « Ces hommes-là ne pensent jamais à leurs propres filles et sœurs...»; « Je me sens vide, sans valeur. Je suis comme un poisson au marché pour lequel on marchande. Il y a eu environ 700 hommes qui ont couché avec moi cette année. » Elle est assise sur son lit, raide. Ses longs cheveux noirs encadrent son regard éteint : «Je sais que si je meurs ce ne sera pas de vieillesse... »
Celle-là a l'air d'une enfant. Son beau visage n'exprime rien d'autre qu'un insondable épuisement. Elle est au-delà des larmes et raconte, d'une voix douce : « Un homme a voulu acheter ma virginité pour 1000 dollars, mais j'ai refusé : j'espérais la garder pour mon mari. Finalement, elle m'a été volée... Si j'étais née dans une famille riche, je ne ferais pas ce travail, je pourrais avoir un avenir meilleur. » Elle pleure à présent en silence. Dans ce pays, l'un des plus corrompus au monde, où les policiers eux-mêmes violentent les enfants, les enlèvements, les viols collectifs, les meurtres se multiplient. « Un jour, j'ai été violée par un gang : près de 50 hommes à la fois. Je me suis évanouie à trois reprises. Ils ont dit qu'ils me violeraient jusqu'à ce que je meure...» «Comment se débarrasser de ce fléau ?, se demande, atterré, le dirigeant d'une ONG. Je suppose qu'il faudrait changer le cœur même de ces hommes... » On n'est pas près d'oublier ces gamines dévastées, ces dignités piétinées, ces petits visages froissés de larmes exprimant toute la tristesse et la misère des sacrifiés. Ce n'est pas seulement le cœur des hommes qu'il conviendrait de changer, c'est aussi, c'est surtout, l'ordre de ce monde sans pitié. R. C.
Magazine. "Planète investigation" : "Cambodge, le commerce de la virginité", (mercredi, à 20h35, France Ô).
2 comments:
Ah Hun Sen, when you read this article, Do you shed your tears?
The condition of those victime caused by your ignorance.
Do you have brain Ah Chkeah Hun Sen?
De même Ah Sihanouk,Comprends-tu la misère du peuple? Tu es un vrai sale espèce. Tu ne mérites pas d'être roi. Kundouy mèh Ah Chkè kbot jeat!
Anonymous, tu es malade, tu as besoin d'aller te soigner, sors de ton trou et vois un psychiatre..
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